• Comme une chanson de Brice Torrecillas
    Comme une chanson de Brice Torrecillas DR

Escapade littéraire et musicale dans le Toulouse des années 80 avec l'auteur Brice Torrecillas

Mis à jour le vendredi 10 février 2023 par Eva Kopp

2017. Paul Maraval vient de mourir, et c’est toute une époque qui remonte à la mémoire de son ancien ami Boris. La folle époque des années quatre-vingt où, passionné de chanson, Boris rêvait de célébrité. Directeur artistique d’une maison de disques toulousaine, Paul fut le premier à croire en son talent et à le prendre sous son aile. Dans une langue vive et chaleureuse, émaillée d’humour, Brice Torrecillas décrit le parcours du combattant d’un jeune artiste de variétés aux prises avec un monde où se confondent les étoiles et les paillettes. Son roman nous livre une réflexion douce-amère sur l’amitié, l’ambition, le milieu du spectacle, mais aussi la création littéraire. Un émouvant hommage aux rêves de jeunesse, ce temps où l’on croit que la vie coulera « comme une chanson ».

 

Un miroir aux alouettes drôle, tendre et cruel

Comment percer dans le monde de la musique des années 80 quand on a pour soi que son talent et qu’on vit à Toulouse ? Durant 213 pages, Brice Torrecillas transforme l’aventure humaine en parcours initiatique qui écorche les rêves et fait grandir l’âme. Dans les paillettes d’un mirage de célébrité, l’arnaqueur narcissique dévore les rêves de l’artiste et sa carrière pourtant prometteuse…Et parce que l’escroc est si attachant, la gifle n’en est que plus cinglante et l'humour cynique et désabusé. Comme une chanson se lit avec une avidité fébrile. On se surprend à fredonner ces chansons qui ont bercé Boris-Brice et qui sont autant de Madeleine de Proust (ou la BO de la jeunesse) pour le lecteur. Peut-être serez-vous surpris, comme je l’ai été, à lire certaines phrases à voix haute pour savourer la musique des mots comme on déguste une friandise ? Brice Torrecillas écrit avec précision, fluidité et générosité. Son écriture est au diapason de notre imagination. Son roman est réglé comme un papier à musique (un tube, forcément). Seul bémol, un goût doux-amer alors que se tourne la dernière page : on n’a pas envie qu’il change de disque.

Comme une chanson aux Éditions Arcanes 17
Comme une chanson aux Éditions Arcanes 17 DR

 

Extrait

"Une chanson m’accompagne toujours. Je me promène à Toulouse ? Le « Ô mon país » de Claude Nougaro résonne dans ma tête. Je croise une femme aux cheveux gras ? Une voix me souffle : « Tu t’laisses aller ». Trop de monde dans la rue ? Je suis « emporté par la foule ». Pour moi, toutes les salades de fruits sont « jolies, jolies », toutes les mers ont des reflets d’argent, tous les oiseaux vivent d’air pur et d’eau fraîche, toutes les Annie aiment les sucettes et tous les légionnaires sentent le sable chaud.
Je complète aussi les paroles que j’entends. Un ami commence : « Elle m’a dit... », et j’enchaîne : « ... d’aller siffler là-haut sur la colline », alors qu’il se plaint des reproches de sa sœur. « Il pleut... » constate un voisin ? Ce ne peut être que sur Nantes, ou bien dans ma maison car toutes les tuiles s’en vont. Ma vie est une comédie musicale, même si cette manie me pèse quelquefois. Je me sens assez fêlé pour fredonner « Je suis mala-a-a-de... » à l’annonce de mon cancer.
« Si tu retenais aussi bien tes maths, tu serais Einstein », grince régulièrement mon père. Mais je ne veux pas être Einstein, moi. Je veux être chanteur. "

 

Entretien avec Brice Torrecillas

Brice Torrecillas
Brice Torrecillas Yann Le Ligeour

Brice Torrecillas a plusieurs cordes à son arc. Journaliste indépendant de presse écrite et audiovisuelle, professeur à l’Institut Supérieur de Journalisme de Toulouse, il a publié cinq romans, un récit un beau livre ainsi que plusieurs nouvelles dans des recueils collectifs. Il anime également de nombreuses rencontres littéraires dans des librairies, des médiathèques et des festivals.

Comment vous est venue l’écriture de Comme une chanson ?

Je n’ai pas eu à la chercher très loin puisque je me suis inspiré en très grande partie de ce que j’ai vécu, même si c’est un roman… J’ai puisé dans ce qui s’est passé de mes 10 à mes 30 ans. C’est un roman que j’ai longtemps porté. Il y a eu plusieurs versions que j’ai proposées à différents éditeurs. À chaque fois, je le reprenais et je retravaillais, encore et encore, car il fallait que ce livre existe. Cette expérience de chanteur a déterminé l’auteur que je suis devenu. Toute cette musicalité, cette clarté me vient de la chanson. Quand j’écris, il m’importe d’être immédiatement perçu, de capter l’attention aussi rapidement que le ferait une chanson.

De manière générale, où trouvez-vous votre inspiration et comment écrivez-vous ?

Tout est propice à l’inspiration. À mes débuts, je n’étais « que » professeur et auteur. Là, je me disciplinais et j’écrivais régulièrement tôt le matin. Depuis, j’ai multiplié mes taches, en plus de professeur, alors j’écris quand je peux. (Il rit) Mes premiers livres, « La Confession », « De parfaits inconnus », « L’ombre et le phare » étaient complètement romanesques. J’ai commencé à rapprocher mon écriture de mon expérience lors de l’écriture de « Collioure la mémoire de la mer ». Puis, j’ai enchaîné par « Ceux qui s’aiment » et « Comme une chanson » qui sont plus près de moi-même et où la dimension romanesque s’est fortement réduite.

 

« Je mets un temps fou pour écrire car même sur une apparence de simplicité, il y a une recherche de musicalité et de fluidité. »

La musicalité du roman incite à le lire à voix haute. Lisez-vous à haute voix au fur et à mesure de votre écriture ?

À une époque, c’était « le gueuloir de Flaubert ». (Il rit) Depuis, j’ai tellement intégré ce souci de musicalité que je n’ai plus ce besoin de lire à voix haute. Néanmoins, cela m’arrive quand je repère à la lecture silencieuse des mots qui peuvent être heurtés.

Écrivez-vous en musique ?

Non ! J’ai besoin du plus parfait silence. Parfois j’écris, alors que je suis seul, avec des boules quiès.

 

Toulouse est aussi, en grande partie, le magnifique décor de votre roman…

J'ai beaucoup aimé ressusciter ce Toulouse qui n’existe plus avec ces lieux mythiques comme le cabaret La Mendingote, le Pensez-y ou encore le restaurant Le Moustic. Toulouse est historiquement la patrie du Bel Canto... Comme s’il y avait un trait d’union entre la musique lyrique et la variété, c’était une place forte de la chanson française. Toulouse est une ville qui se chante et qui chante.

 

Des projets artistiques en cours ?

Je viens d’envoyer une nouvelle à ma maison d’édition qui sera dans un recueil collectif. Je travaille pour le magazine Plaisirs du Gers et je tends mon micro à d’autres auteurs.

 

Ô Toulouse
Ô Toulouse Kristel Riethmuller

Ô Toulouse

Toulouse, c’est…

Un mot : cabocharde

Une émotion : le désir

Une chanson : Ma Préférence de Julien Clerc

Un souvenir : celui d’un baiser au fond du parking Saint-Georges

Un lieu : le palmier des Jacobins

Un restaurant : le J’Go et les P’tits fayots

Un coup de cœur : la librairie Ombres Blanches

Une phrase : « Ce qu’on te reproche, cultive-le, c’est toi. » (Jean Cocteau)

 

Dédicaces

Brice Torrecillas
Brice Torrecillas Anne Torrecillas

18 mars : Salon de Balma

Événements à venir